Les mémoires impliquées dans la pratique de la médiation

Sur cette question des mémoires impliquées en médiation, j'ai préféré  faire appel à un spécialiste du sujet en la personne de Adrien Tedesco.

Adrien est Maître de conférences associé auprès de l' Université de Poitiers, Directeur scientifique chez SENSEI et spécialiste des défis cognitifs et émotionnels du médiateur.

Voilà ce qu'il écrit à propos des mémoires impliquées dans la pratique de la médiation.

Pour mener à bien son rôle, un médiateur fait appel à son outil le plus précieux : son cerveau. En particulier, ce sont ses fonctions cognitives qui lui permettent d’écouter, de comprendre, d’analyser et de prendre des décisions à chaque instant. Parmi ces fonctions, la mémoire joue un rôle fondamental, car elle constitue la pierre angulaire reliant les informations que le médiateur doit traiter en temps réel, leur analyse et l’expérience accumulée au fil de sa formation et de sa pratique. C’est de cette interaction que naissent la décision et le comportement qui en découlera pour la mettre en œuvre.

Bien que, dans le langage courant, on parle de « la mémoire », les sciences cognitives ont mis en évidence l’existence de plusieurs types de mémoire, chacune ayant des propriétés et des fonctions distinctes. Ces mémoires sont essentielles dans la pratique de la médiation, car elles permettent :

1. L’écoute et l’analyse : la mémoire de travail

Éléments centraux dans la médiation, l’écoute, la compréhension et l’analyse reposent en grande partie sur une mémoire à court terme très dépendante de la concentration : la mémoire de travail. Une concentration et une écoute entraînées permettent des analyses plus rapides et des prises de décision plus efficaces.

2. L’automatisation : la mémoire procédurale

À force de répétition, certains comportements (comme la posture, la reformulation, la gestion des silences, etc.) deviennent automatiques grâce à la mémoire procédurale. Cette automatisation est un atout considérable pour le médiateur, car une fois intégrés, ces comportements nécessitent moins d’effort cognitif.

Ainsi, le médiateur économise de l’énergie et peut réinvestir ces ressources dans l’écoute et l’analyse. Cependant, comme un sportif qui s’entraîne pour maîtriser et automatiser ses gestes, le médiateur doit régulièrement pratiquer pour entretenir ses réflexes. Sans cet entraînement, ses compétences risquent de s’affaiblir, l’obligeant à les « réapprendre ».

3. L’apprentissage et l’adaptation : la mémoire épisodique et sémantique

Une posture réflexive, la recherche de feedback et l’analyse a posteriori des situations de médiation sont autant de leviers qui favorisent l’apprentissage.

• La mémoire épisodique, qui stocke les expériences vécues, permet au médiateur de tirer des enseignements des situations passées.
• La mémoire sémantique, qui conserve les connaissances générales et les règles apprises, lui permet d’ajuster ses comportements et ses méthodes en fonction des situations.

En facilitant cet apprentissage et cette adaptation, la mémoire joue un rôle clé dans l’évolution et l’amélioration continue du médiateur"

💡 La solution ? Intégrer une pratique réflexive régulière pour entretenir ses compétences, même en l’absence de cas concrets. Cela passe par :

• La participation à des ateliers d'entraînement permettant de garder les réflexes actifs.
• L’analyse des situations conflictuelles rencontrées au quotidien sous l’angle de la médiation.
• La supervision et l’échange avec d’autres médiateurs pour maintenir une posture professionnelle aiguisée.

Contactez-nous pour en savoir plus et réserver votre place dans nos ateliers d'entraînement : bretjm@mediateur-coach.net

Et si le sujet des défis cognitifs et émotionnels du médiateur vous intéresse, je vous invite à contacter Adrien et consulter son site internet

La formation qu'il anime sur le sujet est tout à fait passionante, tout comme celles proposées par son associé Olivier Chambert Loir sur la médiation transformative. J'ai personnellement suivi ces trois formations et m'en suis trouvé très enrichi.

Pourquoi la médiation est une compétence qui s’use sans entraînement? 

La médiation repose aussi sur des automatismes cognitifs et émotionnels qui permettent au médiateur de faciliter les médiations et en particulier les échanges avec fluidité. Lorsqu’un médiateur ne pratique pas régulièrement, plusieurs risques apparaissent :

• Perte des réflexes d’écoute active : la  reformulation miroir qui était acquise et fluide redevient laborieuse, trouver les bonnes questions de clarification devient moins simple et moins automatique,  la capacité à synthétiser les propos des médiants s’émousse.
• Moins d’aisance dans la gestion du dialogue : sans entraînement, il devient plus difficile de repérer les signifiants et éléments de la conflictualité sur lesquels faire travailler les médiants.
  
  
• Doutes et manque de confiance en soi : face à une situation tendue, un moment de chaos un peu houleux, un médiateur non entraîner peut hésiter et perdre de son autorité naturelle, voire même se laisser prendre par le syndrome de l'imposteur.
  
  
• Risque sur la posture: sans entrainement, certains médiateurs peuvent retomber dans leurs  postures professionnelles habituelles de conseil ou d’arbitrage, par exemple.
  
  

Accompagner une médiation est une compétence vivante qui demande un entretien constant pour rester performante. Sans une pratique régulière, les médiateurs perdent non seulement leurs aptitudes techniques, mais aussi leur capacité à faire face à l'imprévisible.